Parler d'une seule voix pour exiger la justice climatique: à l'initiative du Maroc, un sommet africain s'est réuni mercredi à Marrakech, en marge de la COP22, pour harmoniser la position de l'Afrique face au réchauffement qui la frappe en premier lieu.
Il importe que le continent africain s'exprime d'une seule voix, qu'il exige justice climatique et mobilisation des moyens nécessaires, qu'il émette des propositions concertées, avec des objectifs communs et des projets régionaux et transnationaux structurants, a souligné en ouverture du sommet le roi Mohammed VI.
Alors que la 22e conférence sur le climat bat son plein, ce sommet voulu par Rabat a accueilli une quarantaine de dirigeants du continent, dont une vingtaine de chefs d'Etat, ainsi que le président français François Hollande et le secrétaire général de l'ONU Ban Ki-moon.
Plusieurs présidents ont pris la parole, dont le Sénégalais Macky Sall, qui a rappelé l'attente des pays sub-sahariens après les promesses des pays avancés de financer la lutte contre le réchauffement à hauteur de cent milliards de dollars d'ici à 2020.
Le Congolais Denis Sassou Nguesso a proposé la mise en place d'un Fonds bleu pour le bassin du Congo, le Nigérien Mahamadou Issoufou a présenté le projet de sauvegarde et de réhabilitation du Bassin du Tchad. Le Rwandais Paul Kagame s'est quant à lui félicité du niveau élevé de la représentation du continent à la COP22.
Dans leur déclaration finale, les participants ont lancé un appel aux partenaires stratégiques de l'Afrique pour qu'ils fournissent un appui efficace et concret au développement durable.
Ils ont réaffirmé leurs engagements respectifs pour donner davantage de cohérence à leurs stratégies et (...) accélérer la réalisation des initiatives déjà identifiées ou lancées: l'initiative marocaine triple A pour l'agriculture, celle pour les énergies renouvelables, pour la conservation du Bassin du Lac Tchad, pour une croissance bleue, pour un couloir africain de l'énergie propre, ou encore le Fonds bleu pour le bassin du Congo ainsi que le projet de la Grande muraille verte pour le Sahel...
Il faut agir, alors que l'Afrique, avec 36 des 50 pays les plus touchés par le réchauffement, est à l'avant-garde, a lancé de son côté M. Ban.
Après l'accord de Paris en 2015, il faudra se battre pour que les signatures, les engagements soient confirmés, a souligné le président Hollande.
J'avais appelé lors de la COP21 à la définition d'un plan à l'horizon 2020 pour l'Afrique. Ce sommet en pose les bases, s'est-il félicité.
Au-delà du climat, l'enjeu clé pour l'organisateur marocain de ce sommet était également diplomatique. En réunissant une brochette de leaders africains sur son sol, dont le président togolais Faure Gnassingbé, le Maroc entendait démontrer son engagement fort en Afrique, désormais au coeur de sa diplomatie. Avec comme principal enjeu la question du Sahara occidental, et comme objectif à court terme la réintégration du Maroc au sein de l'Union africaine.
Le Maroc est un acteur engagé, dans la consolidation de la sécurité et de la stabilité régionales. A ce titre, il est déterminé à renforcer sa contribution à la défense des intérêts vitaux du continent, aux côtés de ses pays frères et, bientôt, au sein de l'UA, a clairement réaffirmé mercredi Mohammed VI.
Le roi enchaîne ces derniers mois les tournées diplomatiques sur le continent, non plus seulement dans sa traditionnelle zone d'influence ouest-africaine. Il revient d'un long périple au Rwanda et en Tanzanie, et devrait se rendre à Addis Abeba puis Madagascar juste après la COP22.
L'objectif affiché est de rallier le maximum de soutien sur la question du Sahara occidental, ex-colonie espagnole contrôlée depuis 1975 par Rabat, et dont le Front Polisario, soutenu par Alger, réclame l'indépendance. Rabat peut à cet égard compter sur le soutien de Lomé.
Dans l'immédiat, il s'agit d'obtenir la réintégration du Maroc au sein de l'UA, organisation que Rabat avait quittée en 1984 pour protester contre l'admission de la République arabe sahraouie démocratique (RASD) du Front Polisario.
Ce retour, annoncé à la mi-juillet par Mohammed VI et dont la demande a été formalisée officiellement en septembre, donne lieu à une sourde lutte d'influence avec le rival algérien, toujours autour de la question du Sahara.
Il doit être acté par un vote, et plusieurs questions en discussion, comme le nom du futur président de la Commission de l'UA (son organe exécutif), pourraient en influencer l'issue de façon décisive, alors que le prochain sommet de l'UA est prévu début 2017 à Addis Abeba.